PRESTATIONS DE L’INSTRUCTEUR EN  LOCOMOTION


Le temps d’évaluation

L’évaluation d’une possible perte d’autonomie dans les déplacements est systématiquement effectuée pour toutes les personnes admises dans le SAMSAH. En effet, dans ce champ très spécifique au handicap visuel, il importe de différencier schématiquement  deux catégories de personnes :

  • Les personnes qui ont soit une altération visuelle très sévère, à savoir une cécité ou une acuité visuelle réduite à des PL et celles dont la pathologie est responsable d’une atteinte du champ visuel périphérique (avec parfois une conservation relative de leur vision centrale). Ces personnes témoignent le plus souvent de facto des difficultés dans les déplacements (quand ce n’est pas le motif même de leur demande d’admission dans le SAMSAH
  • Les personnes qui ont une altération visuelle plus relative notamment de leur vision centrale. En effet, par méconnaissance des conséquences de la déficience visuelle dans les déplacements,  les personnes se plaignent rarement spontanément. Or, il importe d’identifier les difficultés car des solutions permettant de les pallier existent.

Ce temps d’évaluation représente l’occasion pour  la personne de se confronter à ses limites mais aussi à ses capacités dans le déplacement. Ce domaine est particulièrement  délicat et peut susciter de l'appréhension qui sera à prendre en compte dans  l'accompagnement.

Pour des raisons environnementales, cette évaluation est effectuée de manière différente dans le SAMSAH ARRADV 13 et le SAMSAH ARRADV 84 :

  • Dans le SAMSAH ARRADV 13, les personnes ont un entretien dans le service avec le professionnel. Cet entretien est  complété  par une évaluation en extérieur dans l’environnement de la personne, quand :
    • La personne ne semble pas relever d’une réadaptation dans ce domaine, ce,  afin de le confirmer et de lui donner des conseils si nécessaire;
    • Le professionnel éprouve le besoin d’une confirmation sur le terrain avant de se prononcer; c’est notamment le cas pour les personnes âgées.

En effet, l’environnement du service est trop dangereux pour proposer une évaluation en extérieur dès cette première rencontre.

  • Dans le SAMSAH ARRADV 84, les personnes ont un entretien dans le service avec le professionnel, suivi par une mise en situation sur un parcours prédéterminé (près du service donc inconnu) qui comporte tous les éléments nécessaires afin d’évaluer la sécurité dans les déplacements: trottoirs contrastés on non, obstacles à différentes hauteurs, reliefs imprévus, traversées avec et sans feux, rues  très ou peu circulantes, escaliers, changements de direction afin d’évaluer l'orientation, passages ombre/lumière …

L’emplacement du local permet cette évaluation systématique sur le terrain.

Cette évaluation sur le terrain est très souvent conforme aux réponses données pendant l’entretien, mais plus précise (par exemple: voitures perçues à telle distance qui explique le sentiment d'insécurité). 


Ce temps d’évaluation  permet de :

  • Evaluer comment fonctionne la personne dans le déplacement, sa conscience du danger potentiel lors des traversées par exemple ;
  • Donner à la personne le sentiment d'être enfin comprise dans ses difficultés et incapacités quand elles sont présentes ;
  • Expliquer de façon objective le pourquoi de ces difficultés afin de permettre à la personne  de les comprendre, de mieux les vivre et de lui donner des conseils afin de les contourner (l'entourage pouvant considérer que c'est un manque de volonté de la personne qui finit par le croire).
  • Déterminer ce qui est souvent le cas chez la personne âgée (atteinte de DMLA) qu’elle pourrait refaire alors qu’elle n’ose plus faire. En ce cas, l'évaluation va  permettre à la personne  de réaliser que c'est possible et déclencher un nouveau désir de déplacement, lui permettre d’oser ressortir.
  • Evoquer la canne, quand le besoin en est identifié. En ce cas, le plus souvent  la personne sait déjà que c'est nécessaire et que cela va lui être proposé. Il est indispensable de le lui dire car elle compte sur l’objectivité du professionnel.
  • Effectuer si besoin un retour immédiat à l'entourage qui accompagne la personne:
    • soit parce que la personne fait part d'inquiétudes démesurées de ses proches qui l'empêchent de se déplacer,
    • soit parce que l’entourage n’ a pas conscience des difficultés réelles (et non pas simulées) de la personne,
    • soit parce que l’entourage a un réel désir d'aider la personne au mieux.

L’entourage et la personne sont souvent reconnaissants de ce retour immédiat et objectif.

  • Préciser avec la personne son projet d’autonomie dans les déplacements qui peut aller de l’environnement du domicile à la possibilité d’effectuer des voyages, en passant par la prise des transports en commun.
  • Déterminer sa motivation et ses capacités.

Une grande part de ces éléments sera à affiner dans le temps d’accompagnement à visée réadaptative.


Fin d’évaluation 

Cette évaluation a permis de déterminer la nécessité ou pas d’une réadaptation qui va s’appuyer sur la conjugaison des éléments suivants :

  • Identification de difficultés
  • Capacité et motivation de la personne  à acquérir des techniques
  • Projet dans les  déplacements

En l’absence d’indication de réadaptation, elle va permettre notamment par exemple de :

  • Indiquer à une personne âgée, voire très âgée, qu’elle peut se déplacer en sécurité autour de chez elle, pouvant ainsi effectuer la plupart de ses trajets de proximité.
  • Poser à son entourage les  possibilités de déplacement de la personne, ce avec son accord.

Conseils

Ce temps permettra le plus souvent au professionnel de donner des conseils, notamment si la personne ne relève pas d’un temps de réadaptation. Ces conseils pourront porter sur :

  • La découverte de la technique de guide; proposée dès l'évaluation lorsqu'il est impossible pour la personne de marcher à côté du professionnel sans être guidée (par exemple une personne non voyante) ou lorsque la personne est très démunie (ne sort plus, angoissée dans le déplacement...).
  • L’essai de filtres teintés: qui en améliorant la perception des contrastes facilitent l’appréhension de l’environnement dans les déplacements. Le port de filtres aura été au préalable envisagé avec l’opticien.
  • Le port de la visière qui apporte un soulagement important à presque toutes les personnes par rapport à l'éblouissement. Très simple et facile à utiliser, les personnes sont souvent étonnées de ne pas y avoir pensé d'elles mêmes; l'argument esthétique passe rapidement en second plan lorsque l'essai a été fait.
  • La technique de protection en intérieur afin d’éviter les obstacles
  • Conseils autres : traversée, écoute des voitures, déroulement du pied…


Notion d’urgence ou plutôt de priorité :  

Un apprentissage en priorité pourra être envisagé dans les cas suivants : 

  • Personnes  jeunes  qui sont  en  perte d'autonomie complète et ont des capacités.
  • Personnes jugées prioritaires par la psychologue (le déplacement pouvant représenter  un moyen de redonner intérêt à la vie)
  • Personnes  n'ayant  pas conscience de leurs  limites et susceptibles de se mettre  en danger
  • Personnes mises en danger par leur entourage par refus de considérer la DV
  • Personnes qui ont un projet professionnel et ont besoin d'être autonomes dans certains déplacements.


Plan de prise en charge ou d’accompagnement

 Dans ce plan, seront déterminés les éléments suivants :

  • Le contenu et la durée de la prise en charge qui vont dépendre des difficultés identifiées, des techniques à acquérir décrites ultérieurement,  de la motivation de la personne à les aborder ainsi que  de son  projet global de déplacement.
  • Le rythme des séances, le plus souvent hebdomadaire. Ce rythme permet aux personnes d’intégrer l’enseignement et de pratiquer entre deux séances. Un rythme plus soutenu du fait de l’importance du travail à effectuer serait parfois nécessaire mais difficile à mettre en place dans un SAMSAH en raison de contingences  matérielles.
  • Le nombre de séances est déterminé au regard des apprentissages à acquérir  et de la combinaison de ces apprentissages dont la liste est détaillée ultérieurement.

 

Le temps de réadaptation

 Il va se mettre en place autour de l’élaboration d’un  projet de déplacement d'abord à partir des difficultés identifiées, puis  affiné  en fonction des demandes de la personne et de son contexte de vie. Dans ce temps pourront être acquises les différentes techniques suivantes dont certaines peuvent se combiner suivant l’objectif de projet personnalisé de déplacement déterminé avec la personne (le nombre de séances est donc donné à titre indicatif et concerne chaque apprentissage pris de façon isolée):

  • Technique de  canne de protection: il est très important de mettre des séances hebdomadaires du fait de la complexité de la technique à acquérir. La durée  sera longue car, souvent il faut aussi y associer un apprentissage des traversées de rues et un travail sur l'orientation, bases nécessaires à un déplacement en sécurité. (environ une quinzaine de  séances). Cet apprentissage demande un important  investissement physique et psychologique pour la personne. Il faut  donc s'assurer de sa motivation avant de commencer. La durée est identique même si la personne n'en n'a besoin que la nuit ou en lieu inconnu.
  • Technique de  canne de signalement : une à deux séances
  • Technique de canne d'appui : une à deux séances.
  • Technique de guide à faire avec l'entourage : une à deux séances
  • Technique de protection intérieure: une à deux séances
  • Technique de  traversée de rues: développement du sens auditif,  utilisation du potentiel visuel (si possible), compréhension du fonctionnement du trafic, mises en situation dans tous types de rues, prise d'assurance (essentiel pour la sécurité) : durée très variable selon le potentiel de la personne (visuel, auditif, moteur, intellectuel) et ses besoins.
  • Utilisation de filtres teintés et/ou visière: une à deux séances.
  • Utilisation des transports en commun: pour des personnes qui ont déjà une certaine autonomie et qui emprunterons les transports: quatre à cinq  séances environ.
  • Travail sur  la demande d'aide (poser des questions aux passants, très important pour une autonomie maximum): quatre  séances environ.
  • Travail sur l'orientation: très fluctuant selon le potentiel de la personne.
  • Travail sur la reprise de confiance dans ses capacités de déplacement, sans difficulté particulière: très variable, parfois la situation de l'évaluation avec un retour objectif peut suffire.
  • Découverte de trajets précis, suite à une autonomie déjà acquise: durée variable.


La transversalité 


Interne

 Avec le psychomotricien

Les échanges  avec ce professionnel sont très fréquents et indispensables du fait de la complémentarité de  travail entre ces deux professionnels, le psychomotricien donnant à la personne tous les  pré-requis psychomoteurs nécessaires au travail de  la locomotion (équilibre, sens proprioceptif,….). De surcroît les acquis en psychomotricité peuvent permettre de renforcer certains acquis en locomotion.

Il est donc fondamental que ces deux professionnels qui œuvrent tous  deux dans le même  champ  de l’orientation/mobilité  aillent  dans le même sens, utilisent  le même vocabulaire, aient  les mêmes  objectifs.

L’utilisation de la canne d’appui, si importante chez la personne âgée peut être indifféremment enseignée par un des deux professionnels.

Enfin une  réflexion commune concernant  l’amélioration des prises en charges, notamment par rapport à l’équilibre, aux risques de chute, aux aides techniques à la marche, doit être effectuée régulièrement.


Avec le psychologue

Le lien est très important et nécessite souvent une réflexion conjointe  pouvant porter sur différents éléments :

  • La motivation de la personne à une autonomie (approfondir la demande)
  • L'acceptation de la canne (étape souvent difficile qui évolue souvent plus rapidement si des échanges réguliers ont lieu entre les deux professionnels)
  • L’appréhension voire véritablement la  peur dans les déplacements (par rapport aux voitures, aux obstacles, aux agressions, à la nuit)
  • La prise de conscience du danger
  • La confrontation aux limites
  • Des difficultés avec les proches concernant la possible autonomie de la personne dans les déplacements

Avec l’ergothérapeute

L’ergothérapeute est un professionnel qui intervient très souvent au domicile ; de ce fait  peut s’établir enter les deux professionnels un échange concernant :

  • La mise en pratique au domicile des techniques acquises, car,  au domicile, les professionnels peuvent voir les personnes mettre en pratique dans d’autres domaines que le leur ;
  • Le vécu de l’intrusion au domicile ;
  • La perception de l’environnement au domicile (participation des aidants de proximité) ;
  • Le comportement de la personne qui peut être différent d’un champ à l’autre,  (l’apprentissage de la locomotion pourrait être moins bien appréhendé du fait d'un frein ou d'une inquiétude de l'entourage par rapport à une autonomie dans les déplacements)....
  • Le travail sur des champs communs comme les courses, les aides techniques à la marche,….

Avec l’orthoptiste

Ce professionnel peut apporter des éléments techniques pertinents, notamment en ce qui concerne la fixation, l’atteinte du champ visuel, la possibilité d’utilisation d’aides optiques au repérage dans les déplacements.

Il peut aussi apprendre certaines techniques reprises ensuite en locomotion à l’extérieur (comme l’utilisation du  monoculaire).

Avec l’assistant de service social

L’échange entre ces deux professionnels est important en ce qui concerne :

  • l’accès aux loisirs qui peut motiver une personne à acquérir une autonomie
  • un retour sur l’identification de situations difficiles au domicile comme de mauvaises relations avec l'entourage, un repli de la personne sur elle-même, pouvant nécessiter l’intervention de l’assistante sociale qui est moins présente au domicile. 

Externe

 Avec l’institut ARAMAV

Du fait de son champ exclusif à la DV et de l’impact de l’apprentissage dans ce domaine, de surcroit inhérent à l’importance de l’atteinte visuelle, c’est le professionnel qui identifie dans son champ seul le plus d’articulation avec l’institut ARAMAV.

En effet, l’apprentissage de la locomotion va parfois relever de cette structure qui permet une  rééducation globale et intensive pouvant être  plus adaptée notamment chez les personnes jeunes qui ont d’importants besoins en locomotion.

Dans tous les cas, il sera intéressant de pouvoir proposer à la personne en sortie de l’ARAMAV, une vérification de la transposition des acquis dans l’environnement de proximité, ce au travers du SAMSAH. 

Avec le secteur de la gérontologie

Un partenariat avec ce secteur peut  permettre  quand elle s’avère nécessaire une approche plus globale de la personne âgée, tant pendant la phase d’accompagnement que lors de la sortie du SAMSAH. 

Avec les revendeurs d’aides techniques

L’instructeur en locomotion est amené à orienter les personnes vers des revendeurs spécialisés, notamment en ce qui concerne la canne de locomotion, mais aussi les GPS.

Il peut aussi être amené à travailler avec des revendeurs non spécialisés comme les pharmacies en ce qui concerne la canne blanche d’appui, dont l’achat doit prendre en compte la problématique visuelle en parallèle avec l’atteinte motrice. 

Avec les services de chien guide

En ce qui concerne l’acquisition d’un chien guide, c’est bien sûr le premier interlocuteur de ces services. C’est ce professionnel en priorité, parfois « aidé » de la psychologue qui va préconiser l’acquisition d’un chien guide à la personne, acquisition qui ne peut se faire sans maitrise parfaite de la technique de canne de locomotion. 

Avec le service d’accessibilité de la ville

L’instructeur en locomotion peut être amené à prendre contact avec ce service afin de tenter d’apporter une solution concrète, lorsqu’il rencontre une difficulté sérieuse liée à un problème d’accessibilité, dans l’apprentissage de la locomotion d’une personne (ex : défaillance d’un feu sonore).

C’est aussi lui qui doit être interpellé par ce service en cas d’étude sur l’accessibilité de la ville aux personnes en situation de handicap visuel.

La Sortie du service 

Elle est actuellement systématisée au travers d’un entretien de fin de prise en charge. L’objectif est de :

  • valider avec la personne l’acquisition des différentes techniques apprises
  • poser avec elle son niveau d’autonomie au regard des déplacements prévus dans son plan de prise en charge.